Herveline a disparu corps et biens alors qu’elle naviguait dans le golfe de Gascogne. Des mois après le présumé naufrage, Loïc le skipper refuse d’admettre l’insupportable sentence, sa compagne ne reviendra pas.
Estelle, 17 ans, s’estime prisonnière à bord de l’Albatros, un luxueux ketch de trente-et-un mètres appareillant pour un tour du monde à la voile
Rien ne destinait ces deux-là à se rencontrer, pourtant une mystérieuse messagère va les réunir sur le voilier.
À bord d’un navire frappé d’une étrange malédiction, le skipper désespéré, les quatre membres d’une famille en souffrance, embarquent pour une odyssée voguant entre réel et fantastique. Contraints par le vaisseau de mettre leurs plaies à nu, ils vont devoir affronter les colères de l’océan mais aussi l’enfer d’un huis clos s’évertuant à débusquer les vérités inavouées.
Un SOS, des histoires de mer.
S.O.S
Comme une bouteille à la mer, à la recherche d'une ville, d'un navire
Qu'on puisse me repêcher et lire
Ce qu'il y a dans mon cœur, ce qu'il y a en moi
Comme une bouteille à la mer, comme une bouteille à la mer j'me sens
J'me sens comme une bouteille à la mer
Comme une bouteille à la mer, j'me sens
Extrait de la Chanson de Psy 4 de la rime
La messagère de verre est une très libre adaptation du spectacle de la Compagnie Effet-ACT : "Bouteille à la mer". Ce spectacle de théâtre participatif aborde d'une manière originale et decalée le douloureux thème du suicide des adolescents.
Les premières pages
PROLOGUE
Quelque part, au large des côtes bretonnes.
Depuis qu’elle a été jetée dans les flots, la messagère affronte sans relâche la puissance des vagues associée à la force des courants. Flottant le plus souvent entre deux eaux, elle se laisse dériver lentement, mais inexorablement en direction des côtes. La dernière goutte de boisson gazeuse qu’elle contenait jadis a été bue depuis longtemps. Pourtant, elle n’est pas inhabitée et seul un dérisoire bouchon de porcelaine protège son précieux contenu des coups de boutoir répétés de l’océan.
Le rivage approche.
Bientôt, soulagée de l’incessant bouillonnement, la bouteille en verre roulera librement sur le sable d’une plage. Une fois son périlleux voyage achevé, il lui faudra accomplir la délicate mission qui lui a été confiée.
CHAPITRE I — SEUL !
Port de Folleux — Nivillac.
Il pleut sans interruption depuis la veille. Un de ces crachins tenaces qui barbouillent le paysage d’une teinte désespérément grisâtre. Une météorologie à rendre neurasthénique le plus forcené des optimistes. Dans la petite maison en bois bleue, la triple horloge à casiers indique qu’il est 20 h 55 à Paris. Les aiguilles de New York et de Londres, grandes et petites, demeurent quant à elles figées, comme si là-bas le parcours du temps s’était suspendu. À quoi bon s’inquiéter de l’heure qu’il fait dans de si lointaines villes dans lesquelles on ne vivra jamais ?
Le port de Folleux, dont on devine quelques incertaines lueurs, est noyé de brumes. Les navires de plaisance, des voiliers pour la plupart, prisonniers de leur chaîne, semblent pétrifiés. Depuis la fin août, les vacanciers ont déserté la région, l’abandonnant sans une once de remords à sa bruine. Ils reviendront l’année prochaine, s’il fait beau.
Dans la cuisine sous éclairée, comme tous les soirs depuis plus de deux mois, Loïc place son assiette sale dans l’évier puis, avec précaution, range l’assiette inutilisée dans le vaisselier.
Comme tous les soirs depuis plus de deux mois, il a préparé un repas pour deux.
Comme tous les soirs depuis plus de deux mois, il a mangé seul.
Après s’être versé un double whisky, le grand blond costaud aux joues hérissées de barbe, s’installe sur la terrasse dégoulinante d’humidité. Laborieusement protégé par l’avancée de toit, assis sur le vieux fauteuil à bascule en rotin, il contemple longuement l’interminable averse d’automne. Des gouttes de pluie folles, poussées par le vent, caressent sans relâche son visage. Ça ne le dérange pas, bien au contraire. Loïc est un marin, il ne craint pas les embruns, même quand ils sont dépourvus de sel.
Intérieurement, les yeux posés sur l’annexe grise qui, posée sur l’herbe de l’étroite prairie, n’en finit pas de se remplir d’eau, il fait le point. Demain encore, il dînera en solitaire, après-demain également. Pourtant, il persistera à faire cuire deux steaks, un saignant, l’autre à point. Il calculera deux parts de patates ou de riz. Par habitude, ou peut-être pour narguer le mauvais sort, sur la table ronde en chêne massif, il déposera deux assiettes, deux fourchettes, deux couteaux, deux verres.
Face à l’ombre qui sait tout sans rien dire, il contemple le visage qui, dans son cadre, lui adresse un sourire noir et blanc.
— Bon sang, tu es passée où Herveline ?
Le cliché portrait demeure silencieux, à moins que l’homme accablé ne perçoive pas le furtif message porté par le vent de Nordet. Son regard se porte sur une seconde gravure épinglée au mur. Elle et lui se tenant côte à côte sur la plage avant du « Treazh Aour », heureux, libres et fiers comme des figures de proue narguant les vagues.
Elle et lui.
Herveline et Loïc.
Les habitants de Nivillac les ont surnommés : « Les amants de l’Atlantique ». Cette modeste commune du Morbihan, marquée par son fleuve La Vilaine qui sur son sillage laisse d’étonnants paysages, est fière de compter parmi ses administrés ce couple de baroudeurs des mers unies par une passion commune, l’océan. Leur vie s’annonçait si belle, leur avenir si prometteur. Mais voilà, il y a trois jours, Loïc a assisté à la messe d’hommage. La petite église était pleine à craquer. Tous étaient tristes, les vieux comme les jeunes. Certains pleuraient. Même le curé, le père Diango, un brave homme originaire du Congo, aussi noir de peau que sa chasuble est blanche, a versé une larme avant de poser ces deux questions :
— Mes amis, qui pourrait croire à cette tragédie ? Qui pourrait consentir à l’impossible ?
Et pourtant, les faits sont là.
Le 26 août, Herveline, naviguant quelque part dans le golfe de Gascogne, a envoyé un ultime message radio informant que son voilier était pris dans une très forte tempête. Le silence angoissant qui suivit se transforma rapidement en inquiétude puis en torture. Vingt et un jours de recherches intensives n’ont rien donné. Aucune trace du catamaran de dix-sept mètres. La séduisante skipper et les trois passagers qu’elle avait embarqués à Saint-Malo ont été officiellement déclarés disparus en mer.
"Un second extrait"
Un titre poétique pour une belle aventure humaine
Désabusé ou dernier espoir, on jette une bouteille à la mer... Qui la trouvera après avoir été portée par les courants ?
Dans ce roman, c'est Loïc, skipper au grand cœur et à l'âme blessé, qui va la retrouver et être touché par le désarroi qu'elle livre. Alors, il s'embarque à nouveau et la mer lui réservera des surprises, comme souvent. Il découvrira aussi que les plus grandes tempêtes peuvent être intérieures.
Voileux moi-même, j'ai beaucoup apprécié les descriptions qui vous collent le sel sur le visage mais aussi la rencontre des personnages, certains haut en couleur.
Que dire d'autre ? J'ai beaucoup apprécié cette lecture et je vous le recommande.
JF…